[Critique] « Une intime conviction » : le film qui met le doute sur l’affaire Viguier

« Une Intime Conviction » est un docu-fiction réalisé par Antoine ­Raim­bault, qui retrace le procès en appel de l’affaire Viguier. Le film, qui est sorti en salles aujourd’hui, nous (re)plonge dans cette affaire qui a secoué Toulouse dans les années 2000.

C’est un film qui s’attache à une affaire judiciaire très complexe. Le 27 février 2000, Suzanne Viguier, épouse et mère des trois enfants de Jacques Viguier, disparaît. Son corps ne sera jamais retrouvé.

Très vite, les soupçons se portent sur le mari de la disparue, Jacques Viguier, professeur de droit à Toulouse. Après des années d’enquête et de procédures qui vont défrayer la chronique, Jacques Viguier est acquitté par la cour d’assise de la Haute-Garonne en 2009. Mais après l’appel du parquet, un second procès est organisé en 2010. C’est à ce moment que débute le film.

Plongée dans le monde judiciaire

Le film mêle à la fois éléments de fiction et réalité, et nous fait suivre Nora, interprétée par Marina Foïs, une chef cuisinière toulousaine, qui va se prendre de passion pour cette affaire. Après avoir convaincu le célèbre avocat Me Éric Dupond-Moretti de reprendre du service pour le second procès, elle va décortiquer certaines pièces du dossier. Un travail considérable, qui va l’éloigner de sa vie de famille, et qui lui fera même perdre son travail.

Mais au-delà de sa volonté de faire acquitter Jacques Viguier, le personnage de Nora est aussi une porte d’entrée pour le spectateur, qui se retrouve plongé dans le monde complexe de la justice.

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À travers ses yeux, le public découvre les relations parfois conflictuelles que peuvent entretenir les avocats avec les juges, et le travail fastidieux de l’avocat tout au long du procès. Mais que le spectateur se rassure, pas besoin d’être un connaisseur du droit pour suivre le film.

« Vous aurez jugé mais vous n’aurez pas rendu la justice »

« Une Intime Conviction » s’attache à un sujet dont chacun a sa propre opinion : coupable ou innocent. Mais au fur et à mesure que le film avance, toutes les certitudes que le spectateur pouvait avoir volent en éclats.

Et c’est là toute la force du film, qui nous montre l’importance de la distinction entre conviction et preuve. Ce dernier met en lumière les difficultés de l’exercice de la justice, et les responsabilités qu’implique le jugement. Une responsabilité qui peut même incomber au citoyen lambda lorsqu’il se retrouve juré en cour d’assises.

L’affiche du film « Une Intime Conviction », d’Antoine Raimbault. / Crédits : Allociné

Mais au-delà du procès de Jacques Viguier, le film pose une question beaucoup plus profonde : que signifie rendre la justice ? Le réalisateur fait appel à la conscience de chacun pour mettre de côté sa propre subjectivité devant cette affaire judiciaire, et devant les affaires judiciaires en général.

Et grâce à une incroyable performance d’Olivier Gourmet dans le rôle d’Éric Dupond-Moretti, « Une Intime Conviction » amène chacun à se demander ce que signifie réellement rendre la justice. Les mots « condamner un innocent », « erreur judiciaire » et « doute » deviennent les leitmotiv du film. Un questionnement efficace qui amène le spectateur à s’interroger sur ce qu’il ferait s’il devait juger à son tour.

Le film aura d’ailleurs une signification particulière pour les Toulousains, qui pourront apercevoir quelques plans de la ville rose, puisque certains plans ont été tournés à Toulouse.

Vous l’aurez compris, le film « Une Intime Conviction » ne fera qu’instaurer le doute dans votre esprit à propos de l’affaire Viguier. Mais au-delà du procès en lui-même, ce film nous permet de réfléchir au sens même de l’expression : « rendre justice ».

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