La consommation responsable, portée par des valeurs éthiques et écologiques, est devenue une préoccupation centrale pour de nombreux consommateurs. Dans ce contexte la seconde main s’impose comme une réponse à la fois à une tendance émergente et à une nécessité face aux défis environnementaux liés à la fast fashion. Ce phénomène prend tout son sens à travers le parcours de Laëtitia, créatrice de la boutique Jeannine et Griotte, située à Saint-Girons, dans l’Ariège. Un témoignage vivant d’une transition réussie du monde de la mode industrielle à celui d’une boutique éthique et locale.
Laetitia, ancienne professionnelle dans l’industrie de la mode pour le groupe Etam, a pris la décision de changer radicalement de cap. Après une carrière bien établie dans le secteur, elle a ressenti le besoin de ralentir son rythme de vie et de s’engager dans une voie plus durable. « Je voulais ralentir, prendre du temps pour moi, et la vie m’a amenée en Ariège », explique-t-elle. C’est dans cette région qu’elle décide de se réinventer.
Une boutique éthique et circulaire

Avant d’ouvrir sa boutique, Laëtitia avait déjà une passion pour la couture et la création. Cependant, elle a vite compris que pour vivre de cette activité, il lui fallait aussi une dimension économique viable. C’est alors qu’elle décide d’intégrer la seconde main dans son modèle. « En arrivant à Saint-Girons, je me suis posé la question en tant que consommatrice : quel genre de magasin j’aimerais trouver ? Je voulais une friperie un peu qualitative, où chaque vêtement serait bien mis en valeur », raconte-t-elle. Son objectif était de proposer des produits uniques et des ateliers de couture dans une démarche respectueuse de l’environnement.
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Sa boutique, Jeannine et Griotte, est aujourd’hui un lieu où la seconde main côtoie la création éthique. Laëtitia s’approvisionne dans des centres de tri de réinsertion professionnelle, comme le centre Emmaüs à Lavelanet, « Le projet a été monté uniquement pour le recyclage », souligne la commerçante. Elle met un point d’honneur à travailler uniquement avec des matériaux recyclés ou récupérés : « Tout est monté sur l’économie circulaire, je travaille avec des vêtements que je répare, je ne produis rien de neuf ».
Des données alarmantes
Les chiffres parlent d’eux-mêmes : chaque année, selon Refashion, 45 milliards de vêtements neufs ne trouvent jamais preneur, un chiffre qui met en lumière l’ampleur du gaspillage dans l’industrie de la mode. En 2023, Shein a détrôné Zara en termes de chiffre d’affaires en France tout en quasiment (+ 80 %) doublant ses émissions de gaz à effet de serre. En 2023, le volume d’affaire d’enseignes comme Zara et Primark ont affiché respectivement des hausses de 70 % et 116 %.
L’industrie de la mode, responsable de près de 10 % des émissions mondiales de gaz à effet de serre selon l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie, est l’une des plus polluantes. En France, selon Refashion, 3,3 milliards de vêtements ont été mis en vente en 2022. Mais derrière ces chiffres, d’après l’UNICEF, il y a aussi une réalité humaine alarmante : 160 millions d’enfants dans le monde sont impliqués dans le travail, dont 16,5 millions dans l’industrie, dont la mode, un secteur où les conditions de travail sont souvent désastreuses.
Jamais autant de produits textiles n’ont été consommés. On estime que si la production de vêtements s’arrêtait aujourd’hui, l’humanité aurait de quoi se vêtir jusqu’en 2100.
« Une carte bancaire, c’est une carte d’électeur »
L’essor de la mode responsable, comme le modèle de Jeannine et Griotte, est une réponse face à ces enjeux. Il devient urgent de changer nos habitudes de consommation pour endiguer la montée de la fast fashion et ses dérives. « Tant que ce ne sera pas légiféré, les gens continueront. Il faut que les gens aient conscience de ce qu’ils font. Une carte bancaire, c’est une carte d’électeur. Ils choisissent ce qu’ils consomment« , clame l’entrepreuneuse.
La transition de Laetitia du monde de la mode industrielle à celui de la mode éthique et locale illustre l’évolution de la consommation vers des pratiques plus durables. En privilégiant la seconde main et en mettant en avant des créations uniques, elle participe à la lutte contre la fast fashion et ses effets dévastateurs sur l’environnement.