Le métier d’agent du Parc National des Pyrénées : passer trois heures à surveiller un oiseau

George Gazo, agent au Parc National des Pyrénées depuis 7 ans. ©Louisa Destugues
Travailler au milieu de la nature, c’est le rêve de plusieurs personnes. Mais en réalité, est-ce-que c’est vraiment si merveilleux ? Le 24 heures est parti à Saint-Lary-Soulan passer une journée avec un agent du Parc National Pyrénées.

Quand on est agent du parc national des Pyrénées, à Saint-Lary-Soulan, la journée commence à 9 heures. On se retrouve à la maison du Parc. En plein milieu du village, cet édifice se distingue avec sa façade en pierres grises. Quand on rentre, il faut monter dans la tourelle pour retrouver les cinq agents du jour. Ils discutent gaiement autour d’un café et d’une galette des rois. Notre guide, c’est Georges Gazo, garde moniteur depuis 7 ans.

Après s’être équipé : polaires, chaussures de marche, jumelles et télescope optiques, il est temps de partir. On monte en voiture, direction la Vallée de Rioumajou. 20 minutes plus tard nous nous posons dans une ancienne colonie de vacances désaffectée.
Sur la route on n’a croisé personne : « à cette période de l’année, on est les seuls à pouvoir monter jusqu’ici. Le sentier est fermé en hiver à cause des potentiels plaques de givre ou éboulements ». C’est dans ce cadre calme et reposant que George déploie son télescope optique : « ma mission aujourd’hui, c’est de surveiller les Gypaètes Barbu qui vivent sur le flanc de montagne là-bas ». Ces oiseaux sont des vautours qui ont une petite spécificité. Il forme un couple à trois, deux mâles et une femelle. Ainsi, ils se relaient pour veiller sur l’œuf et éduquer leur oisillon jusqu’à ses un an.

Un Gypaète Barbu. ©DR

Une surveillance accrue

Cette espèce, considérée comme en danger en France, est surveillée dans les Pyrénées française. Elle a complètement disparu des Alpes dans les années 1935. Peu à peu, ils sont réintroduits dans ce massif montagneux « Ils ont été chassés à cause de leur apparence de diable. Les habitants les ont tués en les empoisonnant, les chassant ou en faisant du braconnage »
Cette surveillance dure près de trois heures. Sans bouger, le froid s’invite rapidement, même pour le professionnel : « je ne sais pas vous, mais je ne sens plus mes pieds moi » rigole-t-il.

« Le métier d’agent de terrain, ce n’est pas le plus facile. Certes on est dans des paysages magnifiques, mais il faut sortir qu’il pleuve ou qu’il vente, par -5 ou 40 degrés ». Il arrive régulièrement aux agents de rester plusieurs heures à observer un animal au loin. Cette surveillance permet de consigner les déplacements de l’espèce, le nombre d’individus présents, son mode de vie… « À notre échelle on ne sait pas trop à quoi ça sert, mais c’est utile pour les scientifiques qui analysent ces données et s’en servent pour expliquer l’évolution des espèces ».

George Gazo surveillant les Gypaète Barbu ©Louisa Destugues

Ça fait déjà deux heures qu’on est posé quand Georges sort son téléphone. En gros chiffre, midi est affiché son fond d’écran : « bon, on sort les casse-croûtes ? ».
Toujours en continuant de surveiller les Gypaètes Barbu, le moniteur sort son déjeuner : du pain de maïs, une salade de pâte, quelques biscuits et une mandarine. À côté, notre simple sandwich jambon beurre fait pâle figure.

Un agent des Pyrénées, ça sert à quoi ?

Tout en mangeant, c’est l’occasion de parler des différentes missions d’un garde moniteur. « Comme vous pouvez le voir en hiver on fait beaucoup de surveillance, on observe les changements de paysage par rapport à l’année dernière et on répond aux demandes des habitants.Par exemple, on voit que plusieurs espèces montent dans les sommets à cause du réchauffement climatique, comme le lézard de Bonnal pour qui il fait trop chaud en bas maintenant ».

Le travail des agents, c’est aussi de signaler des points noirs paysagers, comme les fils électriques ou les usines. « On fait alors une demande à la municipalité ou au gérant pour un démantèlement qui est financé par le Parc. Les poteaux de mines, par exemple. Non seulement ils ruinent le paysage, mais ils peuvent aussi être un danger pour les grands rapaces ».

En été par contre, George et ses collègues revêtent la casquette de policier. Avant d’intégrer l’équipe du Parc National des Pyrénées, ils ont suivi une formation et sont en droit de donner des amendes ou de dresser des procès verbaux. S’il vous vient à l’idée de rentrer dans une zone protégée avec votre chien, de vous garer hors des sentiers ou d’allumer un feu, vous pouvez être sévèrement sanctionné.

Sur les traces de l’ours

12h30, il est temps de ranger nos affaires. George nous emmène sur les pas de l’ours. Et oui, dans la vallée de Rioumajou se promène Cannellito. Le dernier spécimen de souche Pyrénéenne. Ses congénères sont tous d’origine Slovène.
« C’est l’équipe ours brun qui est chargée de le surveiller et de mettre en place les pièges photo, mais on peut toujours y participer », nous explique l’agent. George nous conduit jusqu’à une randonnée où sont posés 7 pièges photos. « Pour attirer les ours on a posé du goudron sur les arbres, c’est une odeur qu’ils adorent. Et pour récupérer des poils, il y a du fil barbelé. Ça ne leur fait absolument pas mal, pour vous donner un ordre d’idée, ils ont une épaisseur de poil équivalente à la longueur d’un doigt ». Malheureusement on ne croisera pas d’ours, aujourd’hui…

L’un des piège photo pour les ours. On peux y voir une coulée de groudron et le fil barbelé où les agents récupèrent les poils. ©LD

16h, il est temps de rentrer. En cette fin de journée, nous faisons une constatation, il faut être en forme pour suivre un garde moniteur. Entre le froid, le dénivelé de la randonnée, les observations répétitives et longues… on est bien content de rentrer chez nous, au chaud.
Alors certes, travailler au milieu de la nature, c’est agréable et magnifique, mais il ne faut pas oublier qu’elle est souvent imprévisible et sauvage.

Pour en savoir plus sur les missions du Parc National des Pyrénées, une vidéo ci-dessous :

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