Selon une récente étude du CNRS (Centre National de la Recherche Scientifique), plusieurs fromages dont le roquefort et le camembert pourraient finir par disparaître si aucune mesure n’est prise rapidement. Mais alors pourquoi ? La réponse est en fait relativement simple : les producteurs risquent de tomber à court « de bons ingrédients ». En effet, certaines souches des champignons utilisés lors de la dernière étape de fermentation des fromages bleus (comme le roquefort) ou du camembert commencent à sérieusement manquer. Un problème de taille pour les producteurs qui est, en réalité, dû à la standardisation des processus de production.
Une erreur de la part de l’industrie agro-alimentaire
Depuis de nombreuses années maintenant, le secteur de l’agro-alimentaire s’est emparé de la production industrielle de nombreux fromages. Et pour pouvoir produire ces fromages en grande quantité et dans des délais courts, les entreprises se sont focalisées sur des souches fongiques capables de leur offrir les points suivants : un développement rapide, un goût jugé appréciable et une apparence vendeuse. Problème, l’industrie a exercé une pression sélective si forte sur ces champignons qu’ils présentent aujourd’hui une diversité de micro-organismes extrêmement faible. De plus, à force de reproduire ces souches de façon asexuée (par lignées clonales), ces derniers perdent peu à peu leur faculté de reproduction sexuée, qui permettrait de garder un mélange génétique correct. Avec des champignons infertiles, la production de fromage se voit donc lourdement pénalisée.
Quel avenir pour ces fromages ?
Si la situation devient grandement problématique pour les producteurs industriels, elle pourrait s’avérer catastrophique pour les petits producteurs qui achètent leurs souches auprès de grands fournisseurs. Plusieurs d’entre eux pourraient ainsi disparaître. Une situation qu’a déjà connue Hélène, vendeuse au sein de la fromagerie Betty à Toulouse : “On a déjà dû faire face à ce genre de situation. Il y a quelque temps, on a perdu beaucoup de producteurs de brie de Melun. C’est dur pour les petits fournisseurs locaux”. Mais une telle perte pourrait aussi faire évoluer les prix de ces produits. Dans les grandes surfaces tout du moins : “Dans les fromageries artisanales, le prix dépend d’abord de la qualité du produit, au final la quantité importe moins”. Un constat qui n’est pas partagé par la grande distribution.
Le fromage en sursis
En résumé, si l’alerte lancée par le CNRS ne signifie pas encore la disparition totale des produits qui bénéficie d’une petite protection grâce à leur statut AOP, ceux qui ne possèdent pas l’appellation risquent de devenir encore moins accessibles. Partant de ce constat, peut-être serait-il plus bénéfique pour tout le monde de devenir moins regardant sur l’apparence du fromage et de découvrir de nouveaux goûts plus forts afin de protéger les producteurs locaux et les repas de famille.