Les étudiants en détresse psychologique

La ligne Nightline est ouverte de 21h à 2h30 du matin. Il existe différents numéros selon la ville où l’on habite (Toulouse : 0582951011). Crédit Photo : Damir Samatkulov/Unsplash
Depuis la crise sanitaire, le mal-être des étudiants s’accentue. L’anxiété, la dépression, les idées suicidaires, la détresse et les stress post-traumatique rythme aujourd’hui la vie des jeunes.

C’est en tout cas ce qu’a déterminé l’étude (COSAMe) du Centre national de ressource et résilience (Cn2r) et ses partenaires. Depuis la crise de la Covid-19 et les confinements qui en ont découlé, la santé mentale des étudiants est devenue un sujet central. En effet, de plus en plus de jeunes disent avoir des complications depuis cette période, que ce soit à cause du stress, de la solitude ou de l’avenir en général.

Les étudiants en détresse mentale

Le Centre national de ressources et de résilience (Cn2r) et ses partenaires ont publié les résultats de ses recherches sur l’état de santé mentale des étudiants universitaires depuis le début de la crise sanitaire. Les chercheurs ont découpé leur recherche en trois temps et ont ciblé plus de 136 000 répondants. Cette étude lancée en avril 2020 à pour objectif de décrire la prévalence des troubles de santé mentale et leur évolution en période de pandémie tout en identifiant les facteurs de vulnérabilité liés. Elle met en avant la nature post-traumatique de cette période de COVID-19 chez les étudiants.

Plusieurs facteurs ont été retenu parmi les 69 000 étudiants universitaires interrogés durant le premier temps d’étude notamment le stress, l’anxiété, la dépression, les idées suicidaires et la détresse.

C’est le cas d’Alexis, étudiant, qui a quitté sa ville natale pour les études. Arrivé sur Toulouse en 2020, il n’a pas bien vécu cette période. « Je me suis retrouvé dans une ville où je ne connaissais personne, en pleine période de COVID, c’était impossible de faire des rencontres », raconte-t-il, avant d’ajouter « J’ai fait une petite dépression je pense. Je suis devenu dépendant à la cigarette, je me suis même créé des problèmes de santé (TCA) avec le stress et la solitude. Ça va mieux aujourd’hui mais ça a vraiment été une période compliquée ».

Alexis garde des traces de ce passage à blanc et a du mal à se sociabiliser et à aller vers les autres : « Je suis très vite fatigué en société alors que j’étais quelqu’un de très sociable avant le COVID, et en même temps je n’arrive pas à être seul sinon je pense trop et j’ai des idées noires. C’est paradoxal », confit le jeune homme. Et il n’est pas le seul, beaucoup d’étudiants se retrouvent dans cette situation. La détresse aigüe concerne 22,4% des étudiants selon le premier temps d’étude du Centre national de ressource et de résilience.

Des jeunes traumatisés

L’étude COSAMe du Centre national de ressources et de résilience a déterminé que près d’un étudiant sur cinq rapporte des symptômes compatibles avec un trouble de stress post-traumatique, et parmi eux, 78,8% considèrent le confinement comme un évènement potentiellement traumatisant.

Un chiffre inquiétant sur l’état mental des jeunes. Chloé, étudiante en sociologie, « je ne vois pas comment on peut sortir indemne d’une expérience comme le COVID, d’autant plus lorsqu’on est jeune, que l’on vit les années où l’on doit sortir, s’amuser…, c’est très dur à vivre », analyse l’apprentie sociologue.

Le dernier temps d’étude du Centre national de ressources et de résilience, menée 15 mois après la pandémie (près de 44 900 répondants), montre une augmentation de troubles de stress post-traumatique avec près de 31% des répondants concernés.

Des aides de l’État

Sylvie Retailleau, ministre de l’Enseignement supérieur et de la recherche, a annoncé en octobre dernier une évolution des aides dédiées à la santé des étudiants. Le Conseil national de l’Enseignement supérieur (CNESER) a voté pour l’élargissement des services de santé universitaire (SSU) pour ce début d’année 2023.

Alors que pendant la période COVID, les SSU ont étendu leurs capacités, ils ont aussi démontré le besoin de mieux se coordonner en ce qui concerne la prise en charge et le suivi de la santé mentale des étudiants. « L’ensemble des étudiants du supérieur, et pas seulement ceux des universités, pourront avoir accès à une offre médicale de prévention et de soins », met en avant la ministre de l’Enseignement supérieur et de la recherche.

Dans la pratique, plusieurs organisations étudiantes et les différents acteurs du monde universitaire se sont réunis depuis janvier 2022 afin de pouvoir cibler au mieux les points à changer. Les réformes des SSU vont permettre une meilleure réponse aux besoins étudiants grâce à une approche territoriale plus approfondie, une meilleure représentation des étudiants dans la gouvernance des SSU et une meilleure légitimité d’action dans l’ensemble des domaines de la santé étudiante (santé mentale, sexuelles, addictions, nutrition).

8,2 millions d’euros débloqués

Sylvie Retailleau, a également promis qu’une enveloppe budgétaire de 8,2 millions d’euros serait débloqué pour ce début d’année 2023. Un budget qui va permettre d’augmenter les moyens de fonctionnement des SSU (qui vont devenir des SSE : service de santé étudiant).

Un outil qui semble non négligeable pour la santé et le bien-être des étudiants d’après Hugo, étudiant en droit : « C’est bien qu’ils mettent ce genre de chose en place, on est beaucoup à en avoir besoin. Je pense que la santé mentale est un sujet super important aujourd’hui et c’est tant mieux. Il faut faire attention à soi et aux autres autour de nous« . L’État n’est pas le seul à avoir mis des choses en place.

Des associations à l’écoute

La santé mentale des étudiants est préoccupante. Après 15 mois de pandémie, 31% des étudiants présentent un trouble de stress post-traumatique. Pour pallier cette augmentation, des associations ont mis en place des systèmes d’aide pour les jeunes adultes le désirant. C’est le cas de Nightline, une ligne d’écoute qui accompagne les étudiants en détresse psychologique. « J’ai découvert cette association il y a quelques mois par un ami. J’appelle au moins une fois par semaine pour me confier, c’est un peu devenu mon journal intime. Je me livre et ça m’aide beaucoup à extérioriser« , se confie Léa, 20 ans, étudiante à la fac du Mirail à Toulouse. L’association a ouvert un service d’écoute qui est 100% gratuit et qui permet de garder sa confidentialité. Sur l’année scolaire 2021-2022, elle a enregistré un total de 13 000 prises de contact, des chiffres en hausse.

Le danger des réseaux sociaux

Une étude britannique a récemment interrogé les jeunes de  14-24 ans sur leur rapport aux réseaux sociaux. Parmi les cinq réseaux les plus utilisés (Instagram, Twitter, Facebook, Snapchat et Youtube), quatre auraient un impact négatif sur la santé mentale.

91% des 16-24 ans seraient attirés par ces plateformes. S’appuyant sur plusieurs études, la Royal Society pour la santé publique a mis en avant 12 facteurs afin d’évaluer les avantages et désavantages des réseaux sociaux chez 1 500 jeunes âgés de 14 à 24 ans.

#StatusOfMind reconnaît que les réseaux sociaux sont, généralement, mauvais pour le moral de ses jeunes utilisateurs. Instagram est considéré comme le réseau social le plus néfaste.

Un problème mondial

De l’autre côté de l’Atlantique, plus de 1 200 familles des États-Unis, sont en procès contre les maisons mères de TikTok, Snapchat, YouTube, Roblox, Instagram et Facebook. Des familles qui ont, pour certaines, perdu un enfant. Des enfants qui se sont suicidés après avoir consulté sur Instagram des tutos montrant comment se pendre. D’autres ont vu leur enfant dépérir.

De plus en plus de personnes prennent conscience du danger des réseaux sociaux sur la santé mentale des plus jeunes, d’autant plus lorsque leur utilisation n’est pas encadrée. C’est le cas de Nathalie, mère d’une jeune fille de 20 ans aujourd’hui qui a subi du harcèlement sur les différentes plateformes. « Je ne connaissais pas vraiment les réseaux sur lesquels était ma fille. Jusqu’au jour où son frère est venu me voir en me disant qu’elle se faisait harceler par certains de ses camarades. Elle avait perdu beaucoup de poids et sa joie de vivre, ça été une période difficile pour elle et pour nous en tant que parents« .

Une prise de conscience à la fois des parents mais aussi des plus jeunes qui se disent plus vigilants sur leur approche aux réseaux sociaux pour protéger leur santé mentale.

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