Pourquoi y a-t-il une grève illimitée à l’Hôpital des enfants ?

Une centaine de manifestant.e.s devant l'Hôpital des enfants, à Toulouse.

Une grève illimitée a démarré ce mardi 11 janvier à l’Hôpital des enfants du CHU de Toulouse. La CGT demande davantage de moyens humains et financiers, pour faire face à une situation jugée « catastrophique ».

La situation est devenue intenable à l’Hôpital des enfants, à Toulouse. C’est ce qu’affirme la CGT, qui a lancé ce 11 janvier une grève illimitée, en parallèle du mouvement de grève national des soignants de l’hôpital public. À 13h aujourd’hui, une centaine de grévistes se sont réuni.e.s dans l’accueil de l’établissement pour une longue minute d’applaudissements. D’après Cédric Mazin, le secrétaire général du CHU de Toulouse, ce sont 13% des soignant.e.s qui ont fait grève. Les revendications sont nombreuses, et éclairent sur les conditions de travail jugées inacceptables pour les soignant.e.s. « Si les choses continuent comme ça, il y aura des centaines, des milliers de morts à l’hôpital », s’époumone Pauline Salingue, figure de la CGT CHU Toulouse, face à une audience conquise.

L’hôpital aux abois

Le manque de personnel est l’une des principales problématiques soulevées par la CGT. « Il nous manque 1 500 postes, […] la direction a annoncé 80 recrutements », vocifère Pauline Salingue, avant d’entrer dans les détails : « En 2020, on compte 250 équivalents temps plein d’heures supplémentaires, 220 équivalents temps plein ont été crédités sur les comptes épargne-temps, et ce n’est pas lié au Covid-19. » Dans les soins critiques, le manque de personnel pose de graves soucis. Pour répondre à cela, la direction du CHU a recruté 72 personnes au sein de l’Hôpital des enfants, sur un objectif de 80 prévu dans le plan hivernal. « Bien entendu, on voulait en recruter plus, mais c’est malgré tout un taux inédit. On lit parfois que la direction n’a pas pris de mesure, on conteste cela fortement », affirme Edouard Douhéret, le directeur des ressources humaines du CHU de Toulouse.

Les conditions de travail des soignant.e.s sont un autre problème. Selon plusieurs témoignages recueillis par Médiacités, la norme d’une infirmière pour deux enfants n’est pas – du tout – respectée. Des heures supplémentaires seraient également prises sur les jours de repos. « Nous comprenons les difficultés des soignants, nous entendons la fatigue, l’épuisement, nous savons à quel point c’est difficile (et) […] à quel point les quelque 700 personnes que représente l’Hôpital des enfants sont touchées », explique Cédric Mazin. Une réponse qui exaspère Gwladys, infirmière puéricultrice à l’Hôpital des enfants. « On parle d’un management très loin de nous, qui s’est donné comme mission de réduire les frais, ils ne voient que ça et ne connaissent pas notre travail », souffle-t-elle. « Si le management est devenu aujourd’hui un management d’entreprise, c’est parce que pour beaucoup l’hôpital s’est transformé en entreprise, qui doit rapporter de l’argent », abonde Pauline Salingue.

Des soignants divisés ?

Après les discours, des discussions et débats en petits comités se sont mis en place sur le parvis de l’hôpital. Le gros des troupes s’est ensuite dirigé vers le centre-ville, au rythme de « Soigner encore », l’hymne en soutien à l’hôpital public à l’initiative de soignants de Rennes et de Nice. L’objectif était de rejoindre la manifestation des travailleurs du social et de la santé, qui a démarré à 14h sur la place Saint-Cyprien. Participer à l’effort collectif, mais ne pas oublier les problèmes internes, voilà comment pourrait se résumer la journée des personnes mobilisées à l’Hôpital des enfants. « On est en flux tendu, on arrive pas à bien soigner, à former les jeunes, à travailler correctement, ça contribue à la spirale infernale », résume Gwladys, peu avant de suivre le groupe.

À l’Hôpital des enfants, la grève d’une partie du personnel devrait se poursuivre dans les jours et les semaines à venir, même si les revendications ne font pas l’unanimité. Plusieurs membres du personnel interrogés à la volée préfèrent ne pas s’exprimer sur le sujet, et si des soignant.e.s ont montré leur soutien aux grévistes en applaudissant conjointement, beaucoup semblent peu enclins à prendre part au mouvement. Force Ouvrière CHU Toulouse, l’autre syndicat incontournable, n’a pas appelé à la grève illimitée. De son côté, la direction assure qu’elle va rester en lien avec les syndicats. « Sans doute qu’avec avec la fin de la période hivernale, nous aurons l’occasion d’échanger de façon un peu plus sereine, et de mettre en place les mesures structurelles attendues », espère Edouard Douhéret.

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