C’est un rachat historique. Pour la somme astronomique de 68,7 milliards de dollars, le géant américain Microsoft s’est offert le studio de développement Activision Blizzard, fondateur de célèbres licences comme Call of Duty ou World of Warcraft. Avec cette acquisition, Microsoft se procure de nouvelles exclusivités et étend un peu plus son empire.
Ce mardi 18 janvier, le monde du jeu vidéo a assisté à un véritable séisme. Alors que l’action d’Activision Blizzard s’est envolée de 37 % à Wall Street, Microsoft signe un rachat sans précédent dans son histoire. En retard sur son concurrent direct dans la vente de console de salon Sony, la multinationale américaine frappe fort et rabat les cartes de l’industrie du jeu vidéo. Ainsi la Xbox, console phare du groupe Microsoft, va potentiellement s’offrir l’exclusivité d’exploitation et de diffusion de jeux vidéo comme Call of Duty ou World of Warcraft. Véritable tentative de remontada, le groupe compte bien talonner si ce n’est devancer les ventes de la Playstation du groupe Sony. Il était temps. Les deux dernières éditions, la Xbox One en 2013 et la Xbox Séries en 2020, accusent un net retard sur les consoles concurrentes, à savoir les Playstation 4 et 5 chez Sony et la Switch chez Nintendo. Le pari de la console de salon n’est pas un hasard. Les ventes de ces dernières ne cessent d’augmenter. Rien qu’en France, en 2018, 52,9 % des foyers étaient équipés d’une console de jeux vidéo. Ce genre de chiffre témoigne de l’importance d’un tel rachat aujourd’hui.
Cependant, pour réellement réaliser l'ampleur du rachat du groupe Activision Blizzard, prenons comme exemple quelques données sur le jeu vidéo qui a forgé sa solide réputation : Call of Duty. À son actif, la licence à elle seule compte 18 jeux-vidéo, sachant que d’autres sont à venir. Tous ont réalisé des ventes record et chaque sortie est largement attendue par la communauté. Chacun des opus comptabilise des millions de ventes pour autant de joueurs. Pour ne citer qu’eux, Call of Duty Black Ops II, l’un des jeux mythique de la saga, avait généré lors de sa sortie en 2012 500 millions de dollars en 24 heures et plus d’un milliard en deux semaines. Call of Duty Warzone, l’opus en mode Battle Royal, comptabilise près de 100 millions de joueurs mensuels. De façon plus concise, parier sur la licence et ses plus de 300 millions d'exemplaires vendus dans le monde, c’est s’assurer un bénéfice certain pour le studio qui la détient. Depuis quelques jours, donc, il s’agit de Microsoft.
Enfin, si l’on regarde au-delà des consoles de salon, avec le rachat d’Activision Blizzard, Microsoft s’octroie également le studio de développement King, connu pour sa célèbre franchise Candy Crush Saga. De cette façon, il entre par la grande porte dans le monde des jeux sur téléphone mobile, à savoir la branche la plus lucrative du gaming aujourd’hui. Les studios King assurent à Microsoft une expertise mobile pour continuer à décliner ses franchises sur vos smartphones.
Call of Duty : une exclusivité Xbox ?
C’est certainement la grande question que se posent les joueurs depuis l’annonce du 18 janvier : Call of Duty deviendra-t-il une exclusivité Xbox ? Pour l’instant, rien n'est officiel, et ce, pour plusieurs raisons. Tout d’abord, si le rachat est annoncé, il doit passer devant les instances qui étudient la concurrence. Microsoft ne doit pas détenir un monopole du jeu vidéo. Joueurs de Playstation, rassurez-vous, Call of Duty sera disponible sur la console de Sony au moins jusqu’au mois de juin 2023, date estimée de la fin d’étude sur la concurrence et de validation définitive du rachat.
Pour la suite, si rien n’est officiel, Microsoft s’est montré rassurant bien qu’évasif, et notamment Phil Spencer, le patron de Xbox Games Studio interviewé par Bloomberg : “Les jeux d’Activision Blizzard sont appréciés sur de nombreuses plateformes et nous prévoyons de continuer à soutenir ces communautés à l’avenir”. Microsoft pourrait continuer de diffuser les licences Activision Blizzard sur les consoles Sony ou Nintendo. Le géant américain se trouve désormais en position de force vis-à-vis des concurrents. On peut imaginer que Sony ne laissera pas tomber une franchise de l’ampleur de Call of Duty. L’entreprise derrière la Playstation pourrait négocier financièrement avec Xbox Games Studios.
Si on regarde dans le rétroviseur, Microsoft n’en est pas à son coup d’essai. En mars 2021, l’entreprise américaine s’offrait les studios Bethesda, à l’origine de franchises iconiques comme Fallout, Doom ou Elder Scrolls. Si les jeux sortis avant le rachat sont jouables sur toutes les plateformes, les prochains jeux comme Starfield seront une exclusivité Xbox. La question reste donc légitime : Microsoft a-t-il dépensé près de 70 milliards de dollars pour partager de telles franchises ? Dans les années à venir, Call of Duty et d'autres franchises seront-elles disponibles sur Playstation ?
L’Empire Microsoft
Avec ce rachat, Microsoft détient désormais plus de trente studios de développement, de quoi faire grossir un peu plus son empire tentaculaire. Évidemment, la firme Américaine n’influe pas uniquement sur le jeu vidéo, loin de là. Système d'exploitation, logiciel ou intelligence artificielle, Microsoft est l’une des multinationales les plus importantes dans le monde. Son chiffre d'affaires ne cesse d’augmenter pour afficher près de 45,3 milliards de dollars fin 2021. Forcément, le géant possède de nombreuses sociétés au travers du globe. De l’Asie à l’Europe en passant par l’Océanie, Microsoft est définitivement un géant dans l’économie mondiale.
Bien que cette carte nous montre à quel point Microsoft s’étend sur la planète, il faut aussi comprendre que même là où l’entreprise ne possède pas de société, sa présence est bel est bien là. On peut remarquer ce phénomène au travers de son système d’exploitation : Windows. Depuis 1985, il écrase très largement ses concurrents comme MacOS ou Linux. Rien qu’en 2019, la firme a déclaré que près de 900 millions d'appareils actifs fonctionnaient sous Windows 10. La diagramme ci-dessous permet de réaliser toute l’ampleur du phénomène.
Le début d’année commence fort pour Microsoft. Après avoir bouleversé le marché du jeu vidéo, le géant du numérique compte bien continuer à s’étendre et à développer son empire toujours plus loin. Outre ses adversaires comme Sony ou Nintendo sur le marché du jeu vidéo et entre autres Apple ou Linux sur le numérique, la firme pourrait bien être confrontée à l’autorité de la concurrence, cherchant à freiner ce monopole quasi mondial.
Thomas Duran & Bastien Loubet