En France, en 2019, on meurt encore dans la rue. Plus que la faim et le froid, la solitude ronge aussi ces survivants qui ressentent de plus en plus d’indifférence à leur égard…
143 000. Ce vertigineux décompte, c’est celui des personnes sans logements, en France, selon une étude de l’INSEE, effectuée sur l’année 2018. Ils sont, malheureusement, de plus en plus sans domicile fixe depuis le début du 21ème siècle. Le chiffre des personnes à la rue a augmenté de 50 % entre 2001 et 2012.
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— Romain Gal (@RgEreDuTemps) December 22, 2017
Chiffres @Abbe_Pierre: +50% de sans abris en 10 ans, 2000 morts chaque année, Mobilier urbain Anti-Sdf. Il faut agir et changer ce qui peut-être changé #SoyonsHumains https://t.co/RQjYsymvYP pic.twitter.com/tw22wWQ4ha
Mais vivre dans la rue, c’est en réalité survivre. En 2019, on estime qu’au moins 369 sans domicile fixe sont mortes dans la rue, du fait de leurs conditions. Souvent, c’est au beau milieu de l’agitation de la rue et la foule que ces hommes et ces femmes ont leur dernier souffle.
« Une mort sociale »
« Vivre dans la rue, c’est une mort sociale. Les gens ne nous regardent pas. Les policiers ne nous protègent pas. Trouver du travail sans logement, c’est impossible. Vivre dans la rue, c’est un terrible engrenage dont il est impossible de sortir sans entourage. Mais le problème, c’est, qu’en général, quand on est dans la rue, c’est qu’on n’a plus d’entourage. », déplore Yusuf, un sans domicile fixe depuis 8 mois, rencontré sur un des bancs de la place Wilson. « Quand tu es invisible aux yeux de la société, car tu n’as ni logement ni travail, tu deviens invisible aux yeux des gens à qui tu demandes 50 centimes pour prendre le bus. »
Justement, pour Yusuf, il y a un « stéréotype du SDF ». « Pour les gens, les sans domicile fixe, c’est juste des pouilleux alcooliques et drogués, c’est pour ça qu’ils ne les regardent même plus ».
Des propos corroborés par Serge, autre SDF croisé aux abord du Capitole. « Ça m’est déjà arrivé de me faire insulter de crasseux en faisant la manche », témoigne ce cinquantenaire. « L’indifférence envers nous, c’est un vrai sujet dont il faut parler. Sur les flots de gens qui passent devant nous, même pas un sur dix ne nous regarde dans les yeux. Je sais que c’est un gros cliché mais un sourire sincère ça réchauffe le coeur pendant quelques secondes » poursuit-il.
Plus que la faim et le froid, la solitude, le sentiment d’être abandonné ronge aussi ceux qui vivent dans la rue. « Le besoin de reconnaissance dans les yeux de l’autre c’est vital. Les gens qui ont une vie sereine ont le devoir de regarder ces gens là, de leur sourire. Entre l’indifférence qu’ils rencontrent et parfois de lourds conflits avec leurs proches, beaucoup de SDF que l’on rencontre ont perdu foi en l’humanité » explique « Le collectif des Morts dans la Rue ».
Un « stéréotype du SDF »
Pour Yusuf, ce manque de considération est parce qu’il y a un « stéréotype du SDF. « Pour les gens, les sans domicile fixe, c’est juste des pouilleux alcooliques et drogués, c’est pour ça qu’ils ne les regardent même plus. Ils ont aussi peur de nous des fois. »
Serge a lui une théorie différente : « Moi je pense surtout qu’ils baissent les yeux quand ils nous voient parce qu’ils s’attendent à ce que l’on leur tire le bras pour leur demander de l’argent. Plutôt que d’avoir à, peut-être, nous dire non. S’ils ne veulent pas donner c’est peut-être aussi qu’ils croient qu’on utilisera leur argent pour acheter de la drogue ou de l’alcool. »
« C’est vrai que le cliché du SDF a la peau dure et cette biaisée qu’ont les gens sur les SDF participe à leur indifférence voire leur mépris. Les riverains, ceux qui vivent à côté des endroits où sont installés des SDF, ont plus de considération pour eux parce qu’ils ont dépassé ce cliché et ils leur ont parlé ».
En 2019, « Le collectif des morts dans la rue » estime qu’au moins 369 sans domicile fixe sont mortes dans la rue, du fait de leurs conditions. Souvent, c’est au beau milieu de l’agitation de la rue et la foule que ces hommes et ces femmes ont leur dernier souffle.